Le nouveau roman d'Édouard Louis, si l’on fait la part de ce qui est vrai et de ce qui ne l’est pas, est le fruit d’une commande de sa mère. L'idée de l'écrire, comme l’avoue le narrateur, est venue de son héroïne même.
Ce n'est pas la première fois qu'Édouard Louis nous conte l'histoire de sa mère, qui se libère de la violence conjugale. Mais cette fois, elle vient en scène "en solo", et toutes les lumières sont dirigées vers elle. Édouard Louis lui prête son attention et son talent, en se mettant lui-même en retrait. Et paradoxalement, il constate qu’en tant que narrateur, rien en littérature ne lui avait jamais autant procuré de joie. Sa mère est importante et consciente de son importance, et devient véritablement ici l'autrice de sa propre vie. Il n’y aurait qu’un pas pour en devenir la narratrice. Sa vie est une fuite et elle a eu la chance que cette fuite puisse se transformer en œuvre. Littéralement, elle monte sur scène. Certainement, tout le monde, toutes les femmes, n'ont pas autant de chance et n’ont pas cette occasion d’ainsi s’accomplir... "Pourquoi certains doivent toujours courir, quand d'autres peuvent dormir ?" L'histoire que nous raconte Édouard Louis dans Monique s'évade n'est pas un éloge de la fuite. La fuite est ici "un fardeau" qui, seulement beaucoup plus tard, "peut générer le Beau". Un hommage à une femme qui se libère et à tou.t.e.s les infatigables dont le destin est de courir.